Traduit par M. Adrien Pouille
Les confréries soufies sénégalaises se sont fait remarquer par leur haut niveau d’institutionnalisation et leur contribution au maintien de la démocratie électorale sénégalaise. Les confréries khadre, tidiane, mouride et layène ont dominé la vie religieuse et sociale depuis la deuxième moitié du vingtième siècle. Même si les statistiques sur les affiliations religieuses laissent à désirer et sont difficiles à obtenir, il est généralement convenu que les confréries tidiane et mouride regroupent plus de disciples. Les Layènes sont issus de la communauté lébou de Dakar et ses environs pour la plupart alors que les trois autres confréries ont des adeptes sur toute l’étendue du pays. La Khadriya est la confrérie soufie la plus ancienne au Sénégal et ailleurs en Afrique de l’Ouest, ayant été très influente en Guinée, au Mali, et dans le Nord du Nigéria. Bien qu’elle ait moins de disciples que la Tidianiya ou la Mouridiya, elle reste encore très pratiquée à l’Est et au Sud du Sénégal. Le centre spirituel de la branche khadre de Bou Kounta se trouve dans la communauté rurale de Ndiassane située à 80 kilomètres au nord-est de Dakar sur la route de Saint Louis.
La communauté de Bou Kounta n’est pas la seule branche de la confrérie khadre représentée au Sénégal. A l’instar de la communauté tidiane, la Khadriya est divisée en plusieurs branches. Certains disciples adhérent aux enseignements de Cheikh Sidïa al-Kébir et de son petit-fils Sidïa Baba de la Mauritanie, d’aucuns suivent Saad Bou et son père Mohammed Fadil Mamin, qui se trouve en Mauritanie aussi, d’autres rejoignent la communauté de Bou Kounta. Sidïa al-Kébir (c.1780-1868) a développé sa communauté à partir de sa base à Boutilimit dans le Sud de la Mauritanie. Il acquit ses connaissances religieuses en étudiant avec Sidi al-Mokhtar al-Kunti et son fils Mohammed
dans la province de l’Azaouad situé au Nord de Tombouctou et a donc partagé un lien spirituel avec Bou Kounta. Son petit-fils Sidïa Baba consolida le
réseau de son père. Mohammed Fadil Mamin (c.1795-1869) reçut son éducation d’érudits locaux dans le Hodh située dans l’Est de la Mauritanie et établit sa propre communauté qui rivalisa avec celle des Kountas dans la région. Son fils Saad Bou (c. 1850-1917) étendit l’influence de son père en allant s’installer à l’ouest à l’âge de seize ans et finit par s’établir à Nimzatt dans le Sud-Ouest de la Mauritanie. Il devint un guide religieux très respecté et finit par développer un
réseau de disciples qui s’étendait jusqu’au Sud de la Sénégambie.