Contemporary Dynamics of the Bou Kounta Qadiri Community
By Maria Grosz-Ngaté
20150619_BayeSidyMoukhtarKounta
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Entretien: Baye Sidy Moukhtar Kounta, Ndiassane, le 19 juin 2015
Première Piste
00 :01 : Daouda Faye : Aujourd'hui, on est content de recevoir notre invité pour discuter de la dynamique contemporaine du Tarikha Kountiyou. Bonjour, Monsieur.
Baye Sidy Moukhtar Kounta: Bonjour.
00 :15 : D. F. : Monsieur est-ce-que vous pouvez vous présenter ?
Je m'appelle Baye Sidy Moukhtar Kounta, je suis le fils de Bou Sidy Moukhtar et de Sokhna Amy Kounta. Je suis né à Ndiassane et j'ai fait mon enfance à Ndiassane, mes deux aïeuls sont du même père. Sidy Moukhtar est le père de Bou et Bou est mon père et il m'a donné le nom de Sidy Moukhtar, ce dernier est le fils de Cheikh Bou Kounta. Serigne Abdoullah est le père d'Aminata et Aminata est ma mère, moi Sidy Moukhtar Kounta. Donc mes deux aïeuls sont du même père, je veux dire Abdallah et Sidy Moukhtar Kounta. Ce dernier et Cheikh Bécaye furent les premiers Khalifes de Cheikh Bou Kounta et ils sont du même père et de la même mère.
01 :17 : D.F. : Avez-vous fréquenté l'école française ?
01 :19 : Non, je n'ai pas pu fréquenter l'école française. J'ai appris le Coran chez un monsieur qu'on appelle Bécaye Samaké.
01 :29 : D.F. : Etes-vous une fois sorti du Sénégal pour aller à l'étranger ?
Oui, j'ai voyagé dans la sous-région. J'ai fait le Mali, j'y suis même revenu avant-hier. J'ai fait la Gambie, la Mauritanie. J'ai un peu visité le pays de Cheikhou Touré [la Guinée Conakry] et je suis aussi parti en Côte d'Ivoire. J'ai eu à visiter ces pays-là.
01 :53 : D.F. : Vous partiez pour étudier ou bien ?
C'était tout simplement dans le cadre d'un voyage mais quand je partais en Côte d'Ivoire, j'y suis allé avec un de mes frères qui s'appelle Sidy Mohamed avec l'intention d'y étudier, mais une fois en Côte-d'Ivoire, comme on était jeune, on a suivi notre désire et on y est resté travailler avec les disciples jusqu'à notre retour en 1976.
02 :21 :D.F. :Est-ce que vous pouvez nous parler un peu de votre vie ?
Oui ! A part les voyages que j'ai eus à effectuer, j'ai passé toute ma vie à Ndiassane. Quand j'étais jeune, j'ai fait Bamako mais à l'époque j'étais jeune, je n'avais même pas encore commencé à étudier, [j'étais] chez une des épouses de mon père qui s'appelait Fanta Togola qui habitait à Premier Badialan, à Bamako. Quand j'ai quitté c'est pour venir ici à Ndiassane. Depuis lors, je ne suis plus sorti de Ndiassane. Tout ce que j'ai eu à accomplir c'est ici que je l'ai fait.
03 :00 : D.F. : Donc vous pouvez nous parler des changements qui ont eu lieu à Ndiassane depuis votre enfance ?
Ce qui m'a le plus marqué de mon enfance ici à Ndiassane ce sont les ruisseaux et les lacs et tous ce qui les entouraient. Jadis, à Ndiassane il n'y avait pas beaucoup de constructions parce qu'il y avait une seule maison qu'on appelait la maison de Cheikh Bou Kounta. Une cité grandit du point de vue de sa population dans la mesure où quand on a beaucoup d'enfants ils sont obligés de sortir. C'est pourquoi, on a aujourd'hui beaucoup de maisons. Cheikh Bou Kounta avait formulé des prières dans le lac ce qui a fait que l'eau a jailli des kilomètres et des kilomètres. Moi qui vous parle, je l'ai suivi à plus de 40 km à travers le Sénégal. Cette eau passe dans beaucoup d'endroits où les gens ignorent même sa source. Les gens cultivaient beaucoup de choses avec cette eau-là. Jadis, on ne cultivait pas du mil ici, on cultivait du riz. On cultivait beaucoup de riz et toutes sortes de légumes, de la patate… on y cultivait tout. C'est quand l'eau du lac a diminué qu'on a commencé à cultiver de l'arachide et du mil.
04 :20 : D.F. :Est-ce que vous pouvez nous parler un peu du développement de la religion dans la localité, ces dernières années?
Je rends grâce à Dieu, la vie religieuse s'est développée avec l'accroissement de la population car Ndiassane a toujours été une cité religieuse. J'ai vu de mes propres yeux mon père amener des enfants du Mali, des contrées qu'on appelle Karata, Balingo et Ganadougou. Il prenait des enfants de partout au Mali, les enfants qui vivaient ici faisaient plus de 60. Il ne leur enseignait pas le Coran. C'est un disciple de son grand-père qu'on appelait Birane Diop et qui faisait office d'imam, qui enseignait le Coran aux enfants.
05 :04 : D.F. :J'ai entendu dire que l'actuel Khalife général, El Hadji Mame Bou, a vécu dans cette maison. Pourquoi avait-il choisi d'être ici?
Je rends grâce à Dieu ! El Hadji Mame Bou, le khalife général de la Khadriya peut être considéré comme mon père ou bien mon oncle. Il était l'ami de son frère [à mon père ?1] qu'on appelait Serigne Bou Sidy Moukhtar. Ils étaient unis et s'entendaient à merveille. C'est pourquoi – quel que soit le nombre d'habitants de la cité, ils étaient tous amis et parents – il l'avait choisi. C'est ce qui fait que quand il venait avec son épouse lors des gamous, le vieux lui cédait sa chambre jusqu'à la fin de l'évènement et ils y étaient aussi à l'aise s'ils souhaitaient rester quelques temps. Et c'est normal parce que c'est son grand frère et il représente tout pour lui.
06 :08 : D.F. : Quel est le rôle que les médias peuvent jouer pour que les disciples aient accès aux enseignements dispensés à Ndiassane ?
On n'aura pas beaucoup de choses à dire sur cela parce que dans ce monde d'aujourd'hui, pour un rien, on te reproche d'être individualiste. Ceux qui viennent vers vous y viennent parce que vous faites appel à eux, sinon ils ne viennent pas, on ne peut pas aller vers quelqu'un si on n'y est pas invité. A chaque fois qu'on les appelle on fera notre devoir envers eux et eux aussi feront leurs devoirs envers nous. Ils nous donnerons leurs points de vue sur la tarikha, le monde, l'Islam… parce qu'il y a beaucoup de radios maintenant. On leur demande de venir. Et on les appelle aussi durant les gamous et durant la nuit où l'on célèbre notre grand-père, Cheikh Bou Kounta, et ils y viennent. Il y a aussi une radio de la place qui vient toujours ici pendant les fêtes de Tabaski et de Korité. Maintenant il y a une nouvelle radio-télévision qui vient et c'est la Sentv. Excusez-moi, je voulais parler de la radio de Youssou Ndour, la TFM. La télé Touba TV aussi vient filmer, la radio Arboura vient couvrir notre Tabaski et notre Korité aussi. Ce sont ces chaînes-là que j'ai vu ici, peut-être qu'il y en a d'autres mais je ne les vois pas.
08 :00 : D.F. : Comment expliquez-vous le soutien du gouvernement lors des manifestations religieuses, pas seulement à Ndiassane, mais aussi aux autres cités religieuses ?
Je ne peux pas beaucoup vous dire à ce sujet. Je pense aussi qu'ils s'adaptent aux réalités du moment parce qu'on souhaiterait voir les représentants de l'état lors des cérémonies religieuses. Du temps de notre grand-père Sidy Lamine Kounta, cela n'existait pas. Mais il convient également de noter que les gamous n'avaient pas cette ampleur. Du temps de notre grand-père Mame Mamadou Kounta, il y avait un représentant de l'état du nom de Jean Colin qui assistait au gamou. A part cela aussi, les ministres venaient lors des gamous. Cela a beaucoup augmenté avec le régime du Président Abdoulaye Wade. Actuellement, on ne voit plus de ministre lors de la nuit dédiée à Cheikh Bou. Ils viennent pendant le gamou mais lors de la nuit dédiée à Cheikh Bou, je ne vais même pas aux tentes réservées aux invités, mais d'après ce que j'entends des gens, il n y a pas de ministre.
09 :31 : D.F. : Donc est-ce que leur présence est obligatoire ?
Leur présence est obligatoire. C'est obligatoire parce qu'il faut se conformer aux exigences de son époque. Si les gens voient les représentants de l'état dans leurs manifestations religieuses, ils en sont fiers. Je ne vais pas aux tentes mais ce sont les gens qui me l'ont dit. Il est très important que lors des manifestations religieuses que le chef de l'état qui est lui-même musulman puisse y assister ou y être représenté. Le Président Senghor n'était pas musulman mais assistait aux manifestations religieuses. Leur présence est donc obligatoire.
10 :22 : D.F. : Quelles sont vos ambitions pour la cité ?
Deuxième Piste
00 :02 : Ce que j'ambitionne pour notre cité est un retour vers Dieu, revoir notre comportement, s'unir comme l'avait instauré notre grand-père car ce dernier l'avait fait au nom de l'Islam. C'est pourquoi beaucoup de gens l'appréciaient et que son nom est connu partout dans la sous-région : Côte-d'Ivoire, Burkina, Mali, Mauritanie… Vous l'avez vous-même remarqué lors des gamous, ils viennent s'inspirer de ce que nous faisons. C'est pourquoi on devrait revoir nos attitudes, envoyer nos enfants à l'école car il n y a pas de mauvais enseignement. Il n y a pas de mauvais enseignement. Je ne veux pas citer de nom à travers les médias mais il y a un condisciple qui est aujourd'hui à l'université, il a étudié en arabe, ensuite il est parti en France et en ce moment il est le doyen de la Faculté de mathématiques de l'une des universités du Sénégal. Cela prouve donc qu'il n y a pas de mauvais enseignement. On doit pouvoir mieux éduquer les jeunes, les inciter à mieux respecter l'Islam parce qu'on est vers la fin des temps. Donc si cela ne dépendait que de moi, on reverra nos comportements, consolidera notre croyance en Dieu. Ce sont là des prières qui me tiennent à cœur et j'en discuterai avec quiconque pourra m'aider dans ce sens. Je remercie également les disciples parce que si on a quelque chose c'est grâce à eux parce qu'on n'a pas d'emploi. On n'a pas d'emploi, ce sont les disciples qui nous aident dans tout ce que nous entreprenons. Comme le dit l'adage « mieux vaut être bénit que d'être riche ». Nous sommes bénits. Quand vous priez, priez pour la bénédiction car c'est grâce à elle que les gens viennent de partout dans le monde pour partager avec nous leurs biens et leurs savoir-faire. Que Dieu nous bénisse donc et bénisse tous les musulmans.
01 :58 : D.F. : Si je vous demandais qu'est-ce qui vous plait le plus dans votre vie, que me répondriez-vous ?
Ce qui me plait le plus dans ma vie, je pense que c'est vraiment l'entente qui existe au sein de notre famille.
02 :21 : D.F. : Qu'est-ce qui vous déplait le plus ?
Les conduites qu'adoptent certains qui étaient parfois parmi nous et qui sont contraires à nos croyances. La foi peut être perturbée très facilement, donc si les Kountas se comportent d'une manière indécente, cela me fait mal. A part cela, rien ne me fait mal.
02 :50 : D.F. : Quel est votre dernier mot ?
Je vous remercie très sincèrement, je prie pour que Mariama Coulibaly qui est venue jusqu'ici puisse transmettre ceci à ceux qui ne peuvent pas venir et qui ne peuvent ni nous voir ni nous entendre. Et à vous aussi Monsieur Faye car mon fils m'a dit que vous êtes un homme véridique, un homme de caractère qui éduque bien les enfants, donc votre conduite dans la cité est irréprochable. Je vous remercie et je prie aussi que tout enseignement qu'entreprennent les gens puisse être couronné de succès. Les mauvais enseignements ne procurent que l'échec parce qu'ils ne seront pas maîtrisés. Ils n'ont ni de début ni de fin, par conséquent ils perdent l'apprenant. Par contre, si l'enseignement est bien dispensé, l'apprenant sera discipliné et saura comment se conduire dans la société. Que Dieu nous accorde paix et grâce !
03 :47 : D.F. : Nous vous remercions aussi du fond du cœur.
~~~~~~~
1 L'interviewé n'est pas précis ici. On ne peut donc pas affirmer avec certitude qu'il parle du frère de son père ou du frère du Khalife.
Première Piste
00 :01 : Daouda Faye : Aujourd'hui, on est content de recevoir notre invité pour discuter de la dynamique contemporaine du Tarikha Kountiyou. Bonjour, Monsieur.
Baye Sidy Moukhtar Kounta: Bonjour.
00 :15 : D. F. : Monsieur est-ce-que vous pouvez vous présenter ?
Je m'appelle Baye Sidy Moukhtar Kounta, je suis le fils de Bou Sidy Moukhtar et de Sokhna Amy Kounta. Je suis né à Ndiassane et j'ai fait mon enfance à Ndiassane, mes deux aïeuls sont du même père. Sidy Moukhtar est le père de Bou et Bou est mon père et il m'a donné le nom de Sidy Moukhtar, ce dernier est le fils de Cheikh Bou Kounta. Serigne Abdoullah est le père d'Aminata et Aminata est ma mère, moi Sidy Moukhtar Kounta. Donc mes deux aïeuls sont du même père, je veux dire Abdallah et Sidy Moukhtar Kounta. Ce dernier et Cheikh Bécaye furent les premiers Khalifes de Cheikh Bou Kounta et ils sont du même père et de la même mère.
01 :17 : D.F. : Avez-vous fréquenté l'école française ?
01 :19 : Non, je n'ai pas pu fréquenter l'école française. J'ai appris le Coran chez un monsieur qu'on appelle Bécaye Samaké.
01 :29 : D.F. : Etes-vous une fois sorti du Sénégal pour aller à l'étranger ?
Oui, j'ai voyagé dans la sous-région. J'ai fait le Mali, j'y suis même revenu avant-hier. J'ai fait la Gambie, la Mauritanie. J'ai un peu visité le pays de Cheikhou Touré [la Guinée Conakry] et je suis aussi parti en Côte d'Ivoire. J'ai eu à visiter ces pays-là.
01 :53 : D.F. : Vous partiez pour étudier ou bien ?
C'était tout simplement dans le cadre d'un voyage mais quand je partais en Côte d'Ivoire, j'y suis allé avec un de mes frères qui s'appelle Sidy Mohamed avec l'intention d'y étudier, mais une fois en Côte-d'Ivoire, comme on était jeune, on a suivi notre désire et on y est resté travailler avec les disciples jusqu'à notre retour en 1976.
02 :21 :D.F. :Est-ce que vous pouvez nous parler un peu de votre vie ?
Oui ! A part les voyages que j'ai eus à effectuer, j'ai passé toute ma vie à Ndiassane. Quand j'étais jeune, j'ai fait Bamako mais à l'époque j'étais jeune, je n'avais même pas encore commencé à étudier, [j'étais] chez une des épouses de mon père qui s'appelait Fanta Togola qui habitait à Premier Badialan, à Bamako. Quand j'ai quitté c'est pour venir ici à Ndiassane. Depuis lors, je ne suis plus sorti de Ndiassane. Tout ce que j'ai eu à accomplir c'est ici que je l'ai fait.
03 :00 : D.F. : Donc vous pouvez nous parler des changements qui ont eu lieu à Ndiassane depuis votre enfance ?
Ce qui m'a le plus marqué de mon enfance ici à Ndiassane ce sont les ruisseaux et les lacs et tous ce qui les entouraient. Jadis, à Ndiassane il n'y avait pas beaucoup de constructions parce qu'il y avait une seule maison qu'on appelait la maison de Cheikh Bou Kounta. Une cité grandit du point de vue de sa population dans la mesure où quand on a beaucoup d'enfants ils sont obligés de sortir. C'est pourquoi, on a aujourd'hui beaucoup de maisons. Cheikh Bou Kounta avait formulé des prières dans le lac ce qui a fait que l'eau a jailli des kilomètres et des kilomètres. Moi qui vous parle, je l'ai suivi à plus de 40 km à travers le Sénégal. Cette eau passe dans beaucoup d'endroits où les gens ignorent même sa source. Les gens cultivaient beaucoup de choses avec cette eau-là. Jadis, on ne cultivait pas du mil ici, on cultivait du riz. On cultivait beaucoup de riz et toutes sortes de légumes, de la patate… on y cultivait tout. C'est quand l'eau du lac a diminué qu'on a commencé à cultiver de l'arachide et du mil.
04 :20 : D.F. :Est-ce que vous pouvez nous parler un peu du développement de la religion dans la localité, ces dernières années?
Je rends grâce à Dieu, la vie religieuse s'est développée avec l'accroissement de la population car Ndiassane a toujours été une cité religieuse. J'ai vu de mes propres yeux mon père amener des enfants du Mali, des contrées qu'on appelle Karata, Balingo et Ganadougou. Il prenait des enfants de partout au Mali, les enfants qui vivaient ici faisaient plus de 60. Il ne leur enseignait pas le Coran. C'est un disciple de son grand-père qu'on appelait Birane Diop et qui faisait office d'imam, qui enseignait le Coran aux enfants.
05 :04 : D.F. :J'ai entendu dire que l'actuel Khalife général, El Hadji Mame Bou, a vécu dans cette maison. Pourquoi avait-il choisi d'être ici?
Je rends grâce à Dieu ! El Hadji Mame Bou, le khalife général de la Khadriya peut être considéré comme mon père ou bien mon oncle. Il était l'ami de son frère [à mon père ?1] qu'on appelait Serigne Bou Sidy Moukhtar. Ils étaient unis et s'entendaient à merveille. C'est pourquoi – quel que soit le nombre d'habitants de la cité, ils étaient tous amis et parents – il l'avait choisi. C'est ce qui fait que quand il venait avec son épouse lors des gamous, le vieux lui cédait sa chambre jusqu'à la fin de l'évènement et ils y étaient aussi à l'aise s'ils souhaitaient rester quelques temps. Et c'est normal parce que c'est son grand frère et il représente tout pour lui.
06 :08 : D.F. : Quel est le rôle que les médias peuvent jouer pour que les disciples aient accès aux enseignements dispensés à Ndiassane ?
On n'aura pas beaucoup de choses à dire sur cela parce que dans ce monde d'aujourd'hui, pour un rien, on te reproche d'être individualiste. Ceux qui viennent vers vous y viennent parce que vous faites appel à eux, sinon ils ne viennent pas, on ne peut pas aller vers quelqu'un si on n'y est pas invité. A chaque fois qu'on les appelle on fera notre devoir envers eux et eux aussi feront leurs devoirs envers nous. Ils nous donnerons leurs points de vue sur la tarikha, le monde, l'Islam… parce qu'il y a beaucoup de radios maintenant. On leur demande de venir. Et on les appelle aussi durant les gamous et durant la nuit où l'on célèbre notre grand-père, Cheikh Bou Kounta, et ils y viennent. Il y a aussi une radio de la place qui vient toujours ici pendant les fêtes de Tabaski et de Korité. Maintenant il y a une nouvelle radio-télévision qui vient et c'est la Sentv. Excusez-moi, je voulais parler de la radio de Youssou Ndour, la TFM. La télé Touba TV aussi vient filmer, la radio Arboura vient couvrir notre Tabaski et notre Korité aussi. Ce sont ces chaînes-là que j'ai vu ici, peut-être qu'il y en a d'autres mais je ne les vois pas.
08 :00 : D.F. : Comment expliquez-vous le soutien du gouvernement lors des manifestations religieuses, pas seulement à Ndiassane, mais aussi aux autres cités religieuses ?
Je ne peux pas beaucoup vous dire à ce sujet. Je pense aussi qu'ils s'adaptent aux réalités du moment parce qu'on souhaiterait voir les représentants de l'état lors des cérémonies religieuses. Du temps de notre grand-père Sidy Lamine Kounta, cela n'existait pas. Mais il convient également de noter que les gamous n'avaient pas cette ampleur. Du temps de notre grand-père Mame Mamadou Kounta, il y avait un représentant de l'état du nom de Jean Colin qui assistait au gamou. A part cela aussi, les ministres venaient lors des gamous. Cela a beaucoup augmenté avec le régime du Président Abdoulaye Wade. Actuellement, on ne voit plus de ministre lors de la nuit dédiée à Cheikh Bou. Ils viennent pendant le gamou mais lors de la nuit dédiée à Cheikh Bou, je ne vais même pas aux tentes réservées aux invités, mais d'après ce que j'entends des gens, il n y a pas de ministre.
09 :31 : D.F. : Donc est-ce que leur présence est obligatoire ?
Leur présence est obligatoire. C'est obligatoire parce qu'il faut se conformer aux exigences de son époque. Si les gens voient les représentants de l'état dans leurs manifestations religieuses, ils en sont fiers. Je ne vais pas aux tentes mais ce sont les gens qui me l'ont dit. Il est très important que lors des manifestations religieuses que le chef de l'état qui est lui-même musulman puisse y assister ou y être représenté. Le Président Senghor n'était pas musulman mais assistait aux manifestations religieuses. Leur présence est donc obligatoire.
10 :22 : D.F. : Quelles sont vos ambitions pour la cité ?
Deuxième Piste
00 :02 : Ce que j'ambitionne pour notre cité est un retour vers Dieu, revoir notre comportement, s'unir comme l'avait instauré notre grand-père car ce dernier l'avait fait au nom de l'Islam. C'est pourquoi beaucoup de gens l'appréciaient et que son nom est connu partout dans la sous-région : Côte-d'Ivoire, Burkina, Mali, Mauritanie… Vous l'avez vous-même remarqué lors des gamous, ils viennent s'inspirer de ce que nous faisons. C'est pourquoi on devrait revoir nos attitudes, envoyer nos enfants à l'école car il n y a pas de mauvais enseignement. Il n y a pas de mauvais enseignement. Je ne veux pas citer de nom à travers les médias mais il y a un condisciple qui est aujourd'hui à l'université, il a étudié en arabe, ensuite il est parti en France et en ce moment il est le doyen de la Faculté de mathématiques de l'une des universités du Sénégal. Cela prouve donc qu'il n y a pas de mauvais enseignement. On doit pouvoir mieux éduquer les jeunes, les inciter à mieux respecter l'Islam parce qu'on est vers la fin des temps. Donc si cela ne dépendait que de moi, on reverra nos comportements, consolidera notre croyance en Dieu. Ce sont là des prières qui me tiennent à cœur et j'en discuterai avec quiconque pourra m'aider dans ce sens. Je remercie également les disciples parce que si on a quelque chose c'est grâce à eux parce qu'on n'a pas d'emploi. On n'a pas d'emploi, ce sont les disciples qui nous aident dans tout ce que nous entreprenons. Comme le dit l'adage « mieux vaut être bénit que d'être riche ». Nous sommes bénits. Quand vous priez, priez pour la bénédiction car c'est grâce à elle que les gens viennent de partout dans le monde pour partager avec nous leurs biens et leurs savoir-faire. Que Dieu nous bénisse donc et bénisse tous les musulmans.
01 :58 : D.F. : Si je vous demandais qu'est-ce qui vous plait le plus dans votre vie, que me répondriez-vous ?
Ce qui me plait le plus dans ma vie, je pense que c'est vraiment l'entente qui existe au sein de notre famille.
02 :21 : D.F. : Qu'est-ce qui vous déplait le plus ?
Les conduites qu'adoptent certains qui étaient parfois parmi nous et qui sont contraires à nos croyances. La foi peut être perturbée très facilement, donc si les Kountas se comportent d'une manière indécente, cela me fait mal. A part cela, rien ne me fait mal.
02 :50 : D.F. : Quel est votre dernier mot ?
Je vous remercie très sincèrement, je prie pour que Mariama Coulibaly qui est venue jusqu'ici puisse transmettre ceci à ceux qui ne peuvent pas venir et qui ne peuvent ni nous voir ni nous entendre. Et à vous aussi Monsieur Faye car mon fils m'a dit que vous êtes un homme véridique, un homme de caractère qui éduque bien les enfants, donc votre conduite dans la cité est irréprochable. Je vous remercie et je prie aussi que tout enseignement qu'entreprennent les gens puisse être couronné de succès. Les mauvais enseignements ne procurent que l'échec parce qu'ils ne seront pas maîtrisés. Ils n'ont ni de début ni de fin, par conséquent ils perdent l'apprenant. Par contre, si l'enseignement est bien dispensé, l'apprenant sera discipliné et saura comment se conduire dans la société. Que Dieu nous accorde paix et grâce !
03 :47 : D.F. : Nous vous remercions aussi du fond du cœur.
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1 L'interviewé n'est pas précis ici. On ne peut donc pas affirmer avec certitude qu'il parle du frère de son père ou du frère du Khalife.
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Courtesy of Maria Grosz-Ngaté
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Creator: Kounta, Baye Sidy Moukhtar
Daouda Faye
Daouda Faye
Description: Baye Sidy Moukhtar Kounta grew up in Ndiassane. Apart from trips to other West African countries, he has spent his entire life in the community. Baye Sidy Moukhtar comments on some of the changes in the religious life of Ndiassane, the role of the media, and the participation of government representatives in religious events. He concludes by stressing the importance of the faith, personal conduct, and education.
Interview conducted in Wolof by Daouda Faye. Translated into French by Gana Ndiaye.
Interview conducted in Wolof by Daouda Faye. Translated into French by Gana Ndiaye.
Date: June 19, 2015
Date Range: 2010-2019
Location: Ndiassane, Thies, Senegal
Format: Audio/mp3
Language: Wolof
Rights Management: For educational use only.
Contributing Institution: Maria Grosz-Ngate; MATRIX: Center for Digital Humanities and Social Sciences at Michigan State University
Contributor: Gana Ndiaye
Digitizer: Maria Grosz-Ngaté